Le CeFAP propose une formation « Spécialisation en Périnatalité » à destination des professionnels médicaux, sociaux ou paramédicaux en activité qui vise à compléter et actualiser des connaissances spécifiques liées à la période périnatale.
Nous avons eu l’opportunité d’échanger avec Céline Vergne qui a suivi ce parcours.
Peux-tu stp te présenter ?
Je suis médecin généraliste (et maman) avec une activité essentiellement tournée vers la femme et l’enfant. Donc mes spécialités sont la gynécologie et la pédiatrie. J’ai toujours voulu faire cela et la médecine générale me permet justement de ne pas être limitée et pouvoir proposer ces différents accompagnements. Je propose aussi des séances d’hypnose médicale, notamment dans le cadre de la préparation à la naissance. Je suis également médecin de deux crèches à Lacanau.
Pourquoi as-tu souhaité suivre la formation Spécialisation en Périnatalité ?
Je ressentais le besoin d’avoir des bases beaucoup plus solides et différentes dans l’accompagnement des familles, des futurs et nouveaux parents qui sont très souvent en souffrance et pour lesquelles nous n’avons aucune formation dans nos études médicales classiques. Le but était d’avoir un réel apport personnel.
Avant cette formation, tu avais déjà des connaissances en gynécologie et pédiatrie. Tu t’es donc formée ?
Oui. J’ai passé mon internat de médecine générale et un Diplôme Universitaire (DU) en pédiatrie en parallèle. En gynécologie, j’ai axé sur la pratique en orientant mes stages vers le suivi de la femme.
Y-a-t-il des sujets que tu traites plus que d’autres avec ta patientèle ?
J’apporte la partie médicale mais j’ouvre aussi beaucoup à toutes les questions non médicales, c’est à dire accueillir les questionnements des futurs parents. Je n’hésite pas à aller plus loin, dans l’expression, le ressenti, le vécu qu’ils ont de cette nouvelle vie. Très souvent, il existe une réelle souffrance lors de cette période d’adaptation et un isolement avec peu de personnes à l’écoute pour les accompagner dans cette étape de vie. Pour moi, l’équilibre de ces familles est très important et prend souvent le dessus sur les questions purement médicales auxquelles nous répondons très vite.
Tu as des demandes en pré et post-natal ?
Oui. Les demandes en prénatal sont beaucoup plus floues que les demandes en postnatal qui sont plus précises. L’ accompagnement est peut-être plus facile en anténatal car nous pouvons accompagner plus globalement alors qu’en postnatal, les parents veulent avoir des réponses très précises que nous ne pouvons pas forcément leur apporter. C’est la grande différence entre le avant/après.
Qu’est-ce que la formation t’a apporté dans ton quotidien ?
Le grand changement dans ma pratique avec cette formation, c’est l’attitude d’écoute qui est différente, qui a été modifiée. Aujourd’hui, je suis dans une posture d’accompagnante plutôt que de sachant.
Est-ce que ça été difficile de repenser sa posture ?
Non. Pas du tout car si nous sommes convaincus que notre posture professionnelle peut évoluer, s’adapter, s’améliorer, il n’y a pas de difficulté. J’ai toujours été ouverte aux changements qui donnent une nouvelle dynamique. Je n’ai jamais été cloisonnée par ce qu’on a pu m’inculquer dans mes études.
Des sujets qui t’ont manqués pendant ta formation initiale ?
Oui, la posture d’écoute. Nous ne sommes pas formés. Nous nous formons nous-mêmes (ou pas). Après, est-ce que nous sommes assez ouverts d’esprit pour la faire correctement ? Tout dépend des personnes. Nous ne sommes pas du tout accompagnés sur ce sujet. On nous parle de plus en plus de la relation médecin/patient, mais dans notre parcours, c’est très court par rapport à tout le reste. C’est sur cette posture qu’il faut insister car c’est la base.
Est-ce que pour toi c’est important de te former ?
Oui. On ne se formera jamais assez. Je me suis toujours formée en parallèle de mes études. C’est plus ou moins facile à mettre en place et on est plus ou moins concentré dans ce qu’on fait. Mais tout bouge, tout change. On réalise des choses, on comprend des choses, on modifie, on recommence. Pour moi, c’est indispensable de se former d’autant plus quand on accompagne en périnatalité, un milieu qui évolue tout le temps.
Est-ce que tu travailles en réseau avec d’autres professionnels ?
Oui. Je travaille avec des sages-femmes et des pédiatres bien que le réseau soit assez minime à Lacanau. Il y a plus de possibilités à Bordeaux. Les patients ne sont pas prêts à faire une heure de route pour avoir davantage de contacts. En tout cas, pas à Lacanau.
Pendant ta formation « Spécialisation en Périnatalité, y-a-t-il eu des moments bouleversants ?
Oui, je pense que cette formation ne laisse pas indemne. Beaucoup de chamboulements. Je pense que l’expérience personnelle de maman y est pour beaucoup. C’est pour cela qu’on a cette sensibilité. Il y a des choses qu’on comprend a posteriori. On réalise les lacunes de l’accompagnement dans cette période de vie, ce qu’il nous a manqué à ce moment-là et qu’on aurait pu avoir. Le partage du vécu de chacune était vraiment très riche et bouleversant et peu importe le sujet abordé. Des choses qui peuvent paraitre insignifiantes, et qui, finalement prennent de l’importance. Et ça touche tout le monde.
Tu dis que le collectif a été très bénéfique ?
Oui, ça c’est très fort. D’être en petit groupe est une force car on s’ouvre sans doute davantage. Evoluer dans ce climat de bienveillance aide beaucoup. C’est d’ailleurs pour ça que les choses sortent et se disent plus facilement.
Y-a-t-il un module en particulier qui t’a plu ?
Je retiens surtout le module sur la théorie de l’attachement. Je n’en avais aucune connaissance et j’ai appris énormément là-dessus. Ça m’a beaucoup plu ! L’intervenant était très bien. Les petits dessins des porte-avions parlent énormément et je pense que c’est comme ça qu’il faudrait le présenter aux parents.
Ce module t’a-t-il donné des outils ?
Oui, dans ma tête, mais je n’ai pas encore vraiment mis en place des choses pratiques à présenter aux parents ou alors, je n’ai pas encore eu de questionnement là-dessus. Je l’interprète en voyant les enfants évoluer dans mon cabinet pour voir s’ils explorent, puis reviennent au contact de leurs parents. Indirectement, je l’utilise tous les jours même si je n’en parle pas systématiquement aux parents.
Mets-tu des nouvelles choses en place dans ta pratique ? A-t-elle évolué avec les enfants ?
Non, je ne crois pas, parce que cette attitude d’écoute avec laquelle je m’adresse à l’enfant dès la salle d’attente, je l’ai toujours eue. C’est lui qui est au centre de la consultation, et parfois, je remets les parents en arrière-plan. C’est un peu difficile pour eux mais quand ils ont compris, ils sont tout à fait contents et ils savent très bien que je reviens vers eux s’il y a besoin de compléter.
Des sujets sur lesquels tu aimerais te former ?
Oui. Ce n’est pas vraiment de la périnatalité mais plutôt sur la partie éducative pour mieux accompagner les parents notamment dans la gestion des émotions de leurs enfants. J’aimerais bien améliorer mes connaissances sur ce sujet car j’ai moins de facilité à accompagner mes patients. Peut-être aussi parce que je traverse cela dans ma vie personnelle.
Des questions qui reviennent plus fréquemment ?
Non, je n’ai pas cette impression. C’est très variable en fonction des parents. Dans l’accompagnement à la naissance, c’est plutôt des questionnements autour de l’accouchement, de la place du père pendant l’accouchement. Après la mise au monde, les questions sont parfois tournées davantage sur l’arrivée du deuxième enfant. Mais ce n’est pas franc.
Un conseil aux personnes qui souhaiteraient se former ?
Il faut essayer de ne pas axer que sur la théorie. Oui c’est important mais je pense qu’il faut vraiment s’ouvrir sur la partie non médicale, ouvrir des portes de réflexion sur plein de nouveaux sujets auxquels nous sommes confrontés. Commencer à s’ouvrir sur des thèmes plus vastes et non que sur les dernières recommandations. Je pense que le plus important pour moi, c’est l’accompagnement et pas la réponse formelle « la science a dit ça donc je vous dis ça ».
Est-ce que tu sais si dans les études, ça évolue ?
En médecine, c’est long. Et en même temps, il y a tellement de choses à traiter que je peux comprendre qu’il y ait des priorités mais il faudrait que le contenu du cursus avance sur 2 chemins parallèles. Et pour l’instant, dans toutes les formations qu’on nous propose, soit c’est très théorique sur un sujet très spécifique, soit ce sont des sujets qui veulent s’ouvrir mais tellement vastes qu’on n’en ressort rien.
Est-ce que ça a été difficile de repenser sa posture. As-tu quelque chose à rajouter ?
Je suis sur le chemin. Il faut que je continue à avoir cette ouverture d’esprit et continuer à me former sur des chemins parallèles. Avoir vraiment un regard ailleurs et complémentaire est important pour moi. Mais il faut faire attention à ne pas se perdre car faire plein de choses en même temps, c’est bien mais si on ne les fait qu’à moitié, on perd tout le bénéfice.
Merci Céline et bonne continuation !
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